Augmentations répétées de la TVA sur les chaudières, arrêtons de stigmatiser les consommateurs !
Monsieur le Premier ministre,
Dans le cadre de la reprise de l’examen du budget 2025, nous, acteurs de la filière de l’énergie dans le bâtiment, appelons à la suppression de l’article 10 du Projet de Loi de Finances pour 2025. Dans sa rédaction actuelle, cet article impacterait injustement le pouvoir d’achat des consommateurs, en réhaussant encore une fois la TVA sur les chaudières à 20 %, après une première augmentation de 5,5 % à 10 %, prise par voie réglementaire le 24 décembre 2024.
Un coup porté au porte-monnaie des Français
Une nouvelle augmentation de la TVA sur les chaudières stigmatiserait inutilement les 10 millions de foyers qui se chauffent avec cet équipement. Une mesure qui serait d’autant plus injuste et contreproductive que le gaz est une des énergies très appréciées des Français et qu’il devient progressivement local et renouvelable.
Par ailleurs, pour près de 4 millions de foyers, les chaudières gaz sont les seules solutions techniques performantes qui leur sont accessibles, que ce soit pour le chauffage ou l’eau chaude sanitaire instantanée. Cette nouvelle hausse correspondrait à un nouveau coup porté au porte-monnaie de ces ménages contraints, au moment du remplacement de leur installation. Elle alimenterait un phénomène de précarité énergétique déjà subie par plus de 10% de la population en impactant les ménages les plus modestes.
Une nouvelle augmentation injustifiée
Le 24 décembre 2024, nous prenions acte, à regret, de l’arrêté publié au Journal Officiel, augmentant la TVA réduite sur les chaudières de 5,5 % à 10 %. Selon l’administration, il s’agit d’une décision prise pour rendre la France conforme à ses engagements européens. Ce taux de 10 % correspond maintenant au taux usuel applicable aux travaux de rénovation.
Pourtant, l’article 10 du Projet de Loi de Finances pour 2025 prévoit encore une nouvelle augmentation de ce taux à 20 %. En l’état, cet article devient inutile, pose des problèmes de définition, constitue une surtransposition et un énième changement préjudiciable :
Sur le taux de TVA :
- Le taux de TVA à 10 % correspond au taux usuel des travaux de rénovation. L’augmenter à 20 % pour le remplacement des chaudières constituerait une charge fiscale excessive, qui affecterait particulièrement les familles modestes.
- De nombreux ménages, limités par des contraintes techniques ou financières, ne pourraient pas supporter ces coûts supplémentaires, ce qui freinerait les efforts de
- Conserver une TVA à 10 % sur le jardinage ou sur d’autres travaux de rénovation et augmenter la TVA à 20 % sur les chaudières performantes est un non-sens économique et écologique, alors même que les combustibles se verdissent et que les chaudières sont d’ores et déjà 100 % compatibles biocombustibles.
Sur l’équipement visé :
- L’expression « chaudière susceptible d’utiliser des énergies fossiles » vient stigmatiser toutes les chaudières, même hybrides et même alimentées par un contrat 100 % biocombustibles et/ou par un réseau contenant une part croissante de gaz verts, jusqu’à 100 % prévus d’ici 2050.
- Une telle formulation, problématique et ambiguë, appliquée à d’autres appareils, pourrait conduire à la pénalisation de toutes les solutions de chauffage, aucune n’étant décarbonée à 100 %. Toutes sont « susceptibles » d’être alimentées avec des vecteurs fossiles ou produits indirectement par des énergies fossiles (réseaux de chaleurs, électricité alimentant des PAC, hydrogène, …).
- Ce n’est pas l’appareil qu’il faut stigmatiser mais les vecteurs énergétiques qu’il faut décarboner.
Sur les changements incessants :
- Le secteur du bâtiment, déjà fragilisé, réclame de la stabilité là où les changements incessants sur les dispositifs de soutien et sur les taxes viennent renforcer l’attentisme des ménages.
- Un passage de 10 à 20 % représenterait une nouvelle hausse injustifiée, susceptible de freiner encore davantage les projets de remplacement des anciens équipements vers des chaudières performantes, en réparant les installations au-delà du raisonnable, tout en aggravant la crise profonde que traverse déjà le secteur du bâtiment.
Priorité à la transition énergétique
Au lieu d’ajouter des taxes et de stigmatiser les consommateurs, il est temps d’encourager le développement des gaz verts et de tous les biocombustibles, ainsi que le déploiement accéléré des chaudières THPE (Très Haute Performance Énergétique) et hybrides. Ces équipements permettent de réduire de 30 à 70 % les consommations, les factures et les émissions de gaz à effet de serre, tout en protégeant le pouvoir d’achat des ménages, la compétitivité des entreprises, les finances publiques et la sécurité énergétique du pays.
Dans un contexte de crise énergétique et d’urgence climatique, la voie la plus accessible de décarbonation repose sur la complémentarité des vecteurs énergétiques et la pluralité des solutions proposées.
D’ici 2050, la France sera en capacité de produire plus de gaz verts que la consommation de gaz projetée en 2050 (tous usages confondus), efforts de sobriété et d’efficacité énergétiques compris. C’est une chance pour notre pays qui peut ainsi envisager une transition équilibrée, axée sur la complémentarité des vecteurs énergétiques grâce aux gaz verts, énergie locale, stockable et renouvelable.
Monsieur le Premier ministre, conscients de votre sensibilité aux questions de pouvoir d’achat, nous formulons l’espoir de pouvoir compter sur votre soutien pour accompagner la décarbonation des bâtiments de manière équitable et sans pénaliser les ménages.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de notre très haute considération.